A quoi servent les SES ?

Publié le par Christophe Gobbé

Actualité richissime, notamment avec la question de la flambée du pétrole.
Je suis resté relativement muet sur les différents propos qui ont eu cours sur l’utilité des SES au lycée.
Je me suis donc demandé quelles réponses un prof pouvait-il apporter sur la question du prix du pétrole. J’ai, à chaque fois, fait une brève référence au programme dans lequel tel ou tel point est traité.
Bien entendu, ces propos ne demandent qu’à être étoffés et enrichis… alors n’hésitez pas ! (surtout si des profs de SES passent sur cette page)
 
M’sieur, pourquoi les prix du pétrole, ils montent ?
Les prix montent car l’offre de pétrole est naturellement limitée alors que la demande augmente, notamment avec le boom économique de certains pays (Chine, Inde, PECO…). Du coup, si l’offre stagne et la demande augmente, les prix augmentent (cf. programme de Première)
 
Alors si le pétrole est plus cher, pourquoi la demande ne baisse-t-elle pas ?
En réalité c’est plus compliqué. La consommation d’essence est faiblement élastique (notamment son élasticité-prix). Certes on peut utiliser davantage les transports en commun, faire du vélo, mais dans un certain nombre de cas, la consommation est difficilement compressible. Du coup, les consommateurs ont une stratégie de substitution d’un produit par un autre : depuis quelques années, les moteurs diesel ont le vent en poupe (ils consomment moins, ce carburant coûte moins cher) de telle sorte que malgré la hausse du prix de l’essence, la part du budget essence dans les dépenses des ménages reste stable.
(cf. programme de Première et de Seconde)
 
Alors sachant que les ménages ne peuvent pas réduire facilement leurs dépenses d’essence, pourquoi l’Etat ne réduit-il pas ses taxes sur l’essence ?
On peut envisager deux réponses. Si on prend l’exemple du tabac dont l’élasticité-prix est également faible, seules des hausses de prix conséquentes conduisent les individus à arrêter de fumer. Dans un contexte de « Grenelle de l’environnement », on peut difficilement inciter les ménages à dépenser plus d’énergie… et les hausses de prix constituent un moyen de limiter cette consommation. Or les questions écologiques prennent une place de plus en plus importante dans les choix politiques… en tout cas, elles s’imposent de fait de plus en plus du fait de la pollution et de l’épuisement des rssources naturelles. (cf. programme de Terminale)
Par ailleurs, la politique fiscale menée depuis quelques années vise à réduire le poids de l’impôt sur les hauts revenus, notamment pour lutter contre l’effet Laffer (« trop d’impôt tue l’impôt »). Néanmoins, les dépenses de l’Etat, elles non plus, ne sont pas incompressibles : passons sur les hausses de salaires du Président de la République, il y a aussi des dépenses pour payer les fonctionnaires, l’éducation, la santé, la défense, la culture, etc. Si on réduit toutes les taxes sur tout, l’Etat s’endette et comme l’un des axes politiques majeurs est également de réduire l’endettement de l’Etat, réduire les taxes sur les produits pétroliers reviendrait à se priver de recettes bienvenues. (cf. programme de Terminale)
 
Dans ce cas là, ça ne change rien : que les gens financent l’Etat par l’impôt sur le revenu ou par les taxes sur les produits pétroliers, ça revient au même !
Probablement que non. Même si ça prête à débat.
L’impôt sur le revenu est progressif. Plus on gagne, plus on doit payer, proportionnellement. C’est un principe constitutionnel. L’idée est que les plus riches doivent participer davantage à l’effort collectif. Certaines personnes pensent néanmoins que faire trop payer les riches les désincitent à travailler, investir, enrichir le pays (le fameux effet Laffer) (programme Terminale)
En revanche, un impôt indirect comme la taxe sur les produits pétroliers (la fameuse TIPP) n’est pas progressif. Tout le monde paye le même pourcentage en fonction de ce qu’il consomme. Néanmoins, on sait que les revenus modestes épargnent proportionnellement moins que les revenus riches (quand tu gagnes le SMIC, pas facile de mettre de l’argent de côté) et que la structure de la consommation est très différente selon les revenus (programme de seconde). Ainsi, pour une personne qui gagne le SMIC, le poids que représentent les dépenses de première nécessité dans son budget (comme l’alimentation, le logement, ou les transports) est bien plus important que pour une personne qui perçoit des revenus élevés.
Ainsi, imaginons deux ménages qui dépensent 300 euros par mois en essence. Le premier ménage gagne au total 2000 euros par mois. Ses dépenses d’essence représentent donc 15% de leur budget. S’ils paient 60% de TIPP dessus, cet impôt représente au total 9% de leur budget mensuel. Le second ménage gagne 6000 euros par mois, les 300 euros d’essence représentent 5% de leur budget et la TIPP plu que 3% de leurs dépenses mensuelles. (programme Seconde, Terminale)
Ce sont donc les plus pauvres qui risquent de payer proportionnellement le plus.
Ajoutons à cela que très souvent, ce sont eux qui ont les voitures en moins bon état, et qui consomment le plus !
 
Alors pourquoi les pauvres ne font-ils pas du vélo ?
D’abord parce que ce n’est pas dit qu’ils puissent faire la plupart de leurs déplacements en vélo, comme toutes les autres catégories sociales.
Ensuite parce que posséder un véhicule, c’est aussi donner une image extérieure de soi… et certaines consommations, même si elles coûtent très cher, peuvent donner un sentiment de valorisation (programme de Seconde)
Enfin parce que posséder un véhicule est aussi une norme. Tout est fait dans la société pour qu’une personne qui n’a pas de voiture ne se sente pas « normale ». Avoir un véhicule c’est également pouvoir se mouvoir, aller chez des amis, aller en vacances. Bref c’est une façon d’être intégré, même si ça peut sembler stupide.(Programme de Première et Terminale)
 
Alors c’est quoi la bonne solution ?
Je ne sais pas, mais c’est ce à quoi réfléchisse les économistes. L’économie, c’est un peu comme la science des choix, choix qui sont compliqués parce qu’ils agissent sur la vie des individus et ont des effets complexes… et ça vaut peut-être le coup de connaître quelques petits mécanismes le jour où vous irez élire des gens pour qu’ils fassent ces choix à votre place (programme Première)
 
 
Pour rédiger ce papier, je me suis appuyer sur ce document et celui-là.

Publié dans chgobbe

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